Piccolo
Piccolo
Angélique Villeneuve et Amélie Videlo
Sarbacane, 2020
Piccolo est depuis longtemps sur le chariot du marchand de jouets ambulant qui circule sur la plage. Quand on est un tout petit canard en plastique, ce n'est pas facile d'attirer le regard des enfants de passage. Pourtant un jour, une petite fille au regard doux le repère mais une main l'entraine au loin lui disant "Tu as bien assez de jouets comme ça !". Le regard triste, elle s'éloigne mais n'oublie pas le petit Piccolo. Malheureusement, la Fille Cruelle, celle qui achète souvent des jouets pour les malmener et les oublier rapidement, porte son regard sur le petit canard, seul jouet qu'elle peut s'offrir avec son dernier sou. Inquiet, Piccolo se laisse emporter...
Cette histoire nous plonge au milieu des jouets dans une ambiance qui rappelle Toy story ou Le soldat rose. Doués de pensées et de mouvements, ceux-ci n'hésitent pas à se mettre en valeur pour être achetés sauf quand c'est la Fille Cruelle en face d'eux. Ils sont chaque jour témoin du sort qu'elle réserve à ses jouets. Piccolo est tout petit et pour lui, c'est difficile de se faire voir, pourtant malgré sa taille, il rêve d'aventures loin du quotidien du chariot à jouets.
Les personnages sont assez contrastés dans cet album, Piccolo et la petite fille ont des personnalités très proches toutes deux douces et gentilles. Au contraire, la Fille Cruelle porte bien son qualificatif. Lors de son entrée dans l'histoire, l'illustration ne montre que son ombre à tresses planant sur les jouets, l'effet est saisissant et il n'y a qu'à voir les visages apeurés des jouets pour comprendre que le danger rôde. Étonnement, ces mêmes jouets ne sont pas des anges avec Piccolo, ils se moquent de sa petite taille et semblent se réjouir quand la Fille Cruelle jette son dévolu sur lui.
Dans les illustrations aux tons doux et aux formes rondes, j'ai beaucoup aimé les points de vue. Plusieurs fois, Amélie Videlo nous offre un gros plan sur le chariot à jouets et parfois on a même l'impression d'être nous-mêmes à l'intérieur. D'un coup, on s'identifie : et nous, si on devait se vendre sans cesse, comment le vivrait-on ? Voilà une invitation à regarder plus loin que les apparences, à poser un regard bienveillant sur les choses. Autre élément à ne pas négliger, les seconds plans. Les personnalités de la petite fille et de la Fille Cruelle sont bien montrées dès les premières pages alors qu'on ne les connait pas encore.
Dans cet album, on parle du regard des autres et des traces qu'il peut laisser sur chacun d'entre nous. Encore plus quand on n'a pas une grande confiance en soi, qu'on est un peu à la marge, qu'on a du mal à s'intégrer et que les autres savent nous le rappeler. Mais ce n'est pas parce qu'on est petit qu'on ne peut pas avoir de grands rêves.