Le petit chaperon rouge
Le petit chaperon rouge
Xavier Deneux
Milan jeunesse, 2020
Vais-je vraiment vous présenter une énième adaptation du Petit Chaperon Rouge après toutes celles qui existent en version plus ou moins fidèles à celles de Charles Perrault ou des Frères Grimm, plus ou moins détournée, plus ou moins réussie ? Oui, mais cette version est particulièrement originale pour ces illustrations et elle a remporté un vif succès auprès de moi et de ma fille de 3 ans.
L'histoire vous la connaissez, celle-ci s'inspire de la version des Frères Grimm qui sauve le Petit Chaperon Rouge et la grand-mère à la fin grâce à l'arrivée bienvenue d'un chasseur. Le texte est assez court, simple et accessible aux plus jeunes : il reprend les passages bien connus et garde un style un peu à l'ancienne. Ainsi on parlera de mère-grand dans un texte au passé simple où on retrouve la fameuse réplique Tire la chevillette, la bobinette cherra.
Ce qui m'a intéressée dans cette version, ce sont les illustrations de Xavier Deneux que je trouve particulièrement originales et réussies. Celles-ci mélangent de la photographie et des formes simples en aplat de couleurs qui représentent des éléments des personnages notamment. Le Petit Chaperon Rouge ne nous montre qu'une main (la photo d'une main d'enfant) : celle qui prend le panier, celle qui parle avec le loup, celle qui marche dans la forêt, celle qui se retrouve dans l'estomac de l'animal... À cette main, on ajoute simplement une forme rouge pour matérialiser la manche chaperon.
Le loup, quant à lui, est principalement représenté par une main aussi mais sous forme d'ombre chinoise. Pour l'anecdote, devant l'engouement de ma fille pour cet album, j'ai eu envie de lui présenter une autre version du Petit Chaperon Rouge (rien à voir graphiquement) et à ma grande surprise elle n'a pas du tout accroché. J'ai donc voulu comprendre pourquoi et elle a soulevé un point que je n'avais pas repéré ! Dans les illustrations de Xavier Deneux, on ne voit pas le loup ! En effet, seul la forme noire le représente et on reconnait parfois bien le jeu d'ombre de la main ce qui fait que l'on a jamais une image vraiment effrayante du loup. Et à 3 ans, la peur du loup est très présente alors cette version qui en parle sans vraiment le montrer lui convenait parfaitement.
Pour terminer sur les illustrations, on remarque que la symbolique est très présente. Parfois, les personnages ne sont même pas montrés et une page rouge ou une page noire suffit à illustrer un dialogue entre les deux protagonistes. De la même façon, le moment où la mère-grand est dévorée est clairement évoqué dans le texte mais simplement représenté par deux gants en dentelles qui se dressent comme si c'était le lecteur lui-même qui se protégeait d'une attaque invisible. Enfin, après des scènes malgré tout intenses et fortes en émotions comme le veut l'histoire, j'aime beaucoup la fin qui fait retomber la pression et nous replonge dans une ambiance enfantine avec le Petit Chaperon Rouge qui se moque ouvertement du loup.
À souligner aussi que les illustrations sont parfaitement mises en valeur par le grand format et le beau papier épais et mat du livre, c'est un détail qui a bien souvent toute son importance, il faut donc le dire.
Tout en gardant un texte fidèle au conte, j'ai beaucoup aimé le traitement original que propose Xavier Deneux pour les illustrations. Ça vaut vraiment le coup d'œil et ça s'adapte bien aux peurs des plus jeunes tout en gardant la nature profonde de l'histoire.