Parlons couture...

Publié le par Audrey

Il fait froid en ce moment et c'est la bonne période pour se réchauffer dans de doux tissus. Les personnages des histoires du jour ne manquent pas d'ouvrages : de fil en aiguille, ils cousent encore et toujours. Une chronique présentée par Audrey que vous pouvez retrouver sur Instagram : Les mots dans le plat.

 

Sophie

 

Les robes de la Reine

Vavoute et l’Atelier Saje

Marcel et Joachim, 2015

 

 

Il s’agit d’un album pop-up au format XXL, qui commence à la manière d’un conte traditionnel. L’histoire est racontée sous la forme d’une fable poétique mêlant rimes et tension dramatique.

Le Roi doit s'absenter pendant une semaine. La fée Carabosse en profite pour exiger de la Reine qu'elle confectionne chaque nuit dans la Tour Vieille une nouvelle robe qu'elle souhaite "extraordinaire", sous peine de mourir…

La Reine est ainsi laissée à son triste sort, sans aucune indication complémentaire, et va donc devoir puiser l’inspiration dans ses goûts et ses humeurs, ce qu’elle aime faire et manger, dans la couleur des décors qu’elle aime visiter pour confectionner sept robes toutes plus époustouflantes les unes que les autres, à découvrir dans le détail grâce au jeu des rabats et des roues, les pages étant toutes animées.

Gourmande, elle imagine une robe sucrée à l’image des vitrines des plus grands pâtissiers, où macarons, cupcakes et sucres d’orge se disputent la vedette.

En voyant la neige tomber derrière sa fenêtre, elle imagine une robe d’hiver, brodée de flocons, parsemée d’empreintes d’ours, dans les plis de laquelle se cache le grand cerf.

Le cinquième soir, elle tisse une robe de printemps, parcourue de feuillages, paradis des petites bêtes de nos jardins.

Pour célébrer l’espoir, elle décide le septième soir de composer une robe en l’honneur de la nuit, quand elle est douce, étoilée, enveloppante et rassurante.

Comme dans les contes traditionnels, la fin est sans surprise : le Roi est de retour et vient délivrer sa belle, plus amoureux que jamais.

Tout en lui expliquant l’odieux chantage de la Fée, la Reine lui avoue dans un sourire que coudre lui a permis de l’attendre sans trop s’inquiéter, puisqu’elle était très occupée. Elle sera mise à l’honneur en revêtant les sublimes robes qui, je vous le donne en mille, lui vont comme un gant…

Un très bel objet qui parle couture sous l’angle poétique, et qui fera assurément rêver les petites princesses, et les petits princes aussi !

 

Mon premier livre de motifs

Bobby et June George, Boyoun Kim

Phaidon, 2017

 

 

Un petit format cartonné pour un imagier original ! Il n’est en effet dédié ni aux couleurs ni aux animaux, mais bien aux différents motifs que nous croisons au quotidien sur les tissus des vêtements ou d’ameublement et dans la décoration textile des objets en général.

À chaque fois, le motif est décomposé, le lecteur comprend donc à partir de quelle forme connue le motif est élaboré. Ainsi plusieurs lignes droites forment… des rayures ! Des lignes épaisses et fines forment un motif… écossais ! Plusieurs cercles forment… des pois !

Pour chaque motif, le petit lecteur est ensuite invité à rechercher sur une double-page le motif en question, représenté de façon plus ou moins grande, plus ou moins serrée, mais toujours de façon colorée !

À la fin, tous les motifs rencontrés au fil des pages sont répertoriés sous forme de glaces particulièrement alléchantes !

Un livre atypique pour affiner son sens de l’observation et devenir imbattable sur le nid d’abeille, l’arlequin ou le cachemire dans toutes les situations du quotidien !

 

Le tailleur de Gloucester

Beatrix Potter

Gallimard jeunesse, 1980 (première publication en 1903)

 

 

C’est l’histoire d’un vieux tailleur, pauvre, mais toujours soucieux de couper ses tissus au plus près, pour qu’ils taillent au plus juste les hommes nobles qui venaient lui commander leurs plus beaux costumes d’apparat. Il laissait toujours ses chutes de tissu en évidence, pour permettre aux souris qui habitaient les maisons voisines, de venir se servir pour se vêtir.

 « Un jour de grand froid, aux alentours de Noël, le tailleur reçut commande d’un habit – un bel habit de soie couleur cerise, brodé de pensées et de roses avec gilet assorti de satin crème orné de gaze et de chenilles vertes – et cet habit était destiné au maire de Gloucester. »

Ce jour-là, à la fin de la journée, les coupons de soie et de satin étaient prêts à être assemblés, les revers de poche, la doublure de taffetas, les manchettes et les boutons étaient disposés sur la table, prêts à être cousus. Comme la nuit tombait et qu’il était épuisé de sa journée de travail, il rentra chez lui retrouver son chat Simon, à qui il confia quatre sous pour aller acheter un peu de lait, du pain, des saucisses et… la bobine de fil de soie couleur cerise qui lui manquait pour la dernière boutonnière.

Entre-temps, une mauvaise fièvre s’empara du tailleur. Malade et agité, il alla rapidement se coucher, après avoir libéré les souris que le chat retenait prisonnières sous les bols et tasses du vaisselier.

En rentrant, Simon s’aperçut que les souris avaient été libérées, et se vengea en cachant la bobine de fil de soie.

Les petites souris avaient entendu le tailleur délirer dans son sommeil, s’inquiéter de ne pas avoir la force de finir l’habit de mariage du maire, alors elles décidèrent de l’aider.

C’est un très joli conte de Noël à l’ancienne dans le décor d’une ville anglaise sous la neige, où la générosité triomphe par magie, malgré les difficultés de la vie.

Les illustrations de Beatrix Potter, fourmillant de détails, sont magnifiques et donnent à ce conte l’atmosphère si particulière qu’elle savait si bien créer autour des animaux qu’elle mettait en scène.

 

 

La nappe blanche

Françoise Legendre

Thierry Magnier, 2016

 

 

Les étoffes ont une histoire, elles sont au premier rang, au fil des générations, des joies des retrouvailles. Elles disent le tintement des verres qui trinquent, la folie des jours de fête, la solennité des engagements. Pliées, dépliées, déployées, cachées, montrées, brodées, ornementées, les étoffes ont beaucoup à raconter aux mains qui les reçoivent. Elles se transmettent comme des trésors de génération en génération.

C’est tout ce que dit ce petit roman. La nappe blanche, « une merveille de fil de lin blanc » naît à la lumière de la lampe à pétrole, sous les doigts de Jeanne en novembre 1910, en vue du mariage de sa petite-fille Anna avec Jean, prévu pour l’été suivant. Et puis la fête arrive, la nappe blanche recouvre la table installée pour l’occasion près des pommiers, à l’ombre du grand chêne. Anna et Jean s’aiment, Jeanne sourit en pensant aux fêtes de famille à venir, qui seront l’occasion pour Anna d’ouvrir la porte de la vieille armoire et de ressortir cette superbe nappe blanche, brodée avec tant de soin, avec tant d’amour. Mais trois ans plus tard, l’heure de la mobilisation générale a sonné, il est temps pour Anna, devenue mère de famille, d’embrasser Jean avant qu’il ne monte dans le train qui l’emmènera au front. En faisant sa valise, pour se donner du courage, elle a effleuré de sa main la jolie nappe pliée, celle qui sent bon les jours heureux.

La nappe sera ainsi au cœur des grandes étapes et des tournants de la vie de la famille d'Anna et de ses descendants jusqu'en 2014.

L’art de la broderie comme vecteur d’amour et d’histoires dans l’Histoire, de main en main, de famille en famille, parce que les écrits restent, mais les ouvrages aussi, indéniablement.

 

Pile-poil

Birdie Black et Rosalind Beardshaw

Gallimard jeunesse, 2012

 

 

La veille de Noël, le roi fait le tour du marché et tombe sur un gros rouleau de tissu, d'un rouge aussi vif que doux.

Il imagine tout de suite le manteau que la princesse trouvera au pied du sapin. De retour au château, il demande aux couturières de déposer les chutes devant la porte de service. C'est donc la cuisinière qui trouve le paquet de chutes à la fin de sa journée de travail et imagine, enchantée, une veste pour sa maman. Une fois son ouvrage terminé, elle n'oublie pas de cacher les chutes à l'arrière de sa maison, pour que la surprise soit totale pour sa maman !

C’est alors qu’un petit blaireau surgit et trouve à son tour ces morceaux de tissu, qui tombent "pile-poil" pour la confection d’un chapeau bien chaud pour son papa !

Tous les habitants de la forêt profiteront ainsi du gros rouleau de tissu royal jusqu’à la toute dernière chute, qui fera office d’écharpe pour le petit garçon de la souris.

Un petit bout de tissu, c'est peu mais tant à la fois. Dans cet album, c'est un peu d'or qui offre la possibilité de faire, avec ses mains, le petit cadeau qui fera briller les yeux de celle ou celui que l'on aime, qui réchauffera son cœur et son hiver. C’est un peu d’or qui permet surtout à ceux qui le reçoivent, d'offrir à leur tour.

Un très joli conte-randonnée aux couleurs de Noël sur le partage et le plaisir d’offrir, autour du « fil rouge » de ce paquet de chutes qui diminue de page en page, pour le bonheur de ceux qui savent l'utiliser.

L'esprit de Noël est bien là, dans la chaîne de solidarité des habitants à deux jambes ou à quatre pattes qui se construit au fil des pages de ce petit cartonné.

Attention cependant, la légende du Père Noël y est indirectement démentie, car les personnages offrent les cadeaux qu'ils fabriquent à leurs proches… sans aucune allusion au grand barbu.

 

L'avis de Sophie

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